Dilemme du hérisson : connaissez-vous ce paradoxe sibérien ?


Culture, En passant / samedi, août 27th, 2022

Popularisé par Schopenhauer et Freud, le dilemme du hérisson provient d’un vieux conte sibérien. Il met en relief l’importance de trouver le juste milieu entre trop et trop peu de proximité avec autrui.

Imaginez deux hérissons dans l’immensité glaciale de Sibérie. Le vent projette la neige dans un mouvement anarchique. L’eau se fige, l’air devient fumée. Le froid est si pénétrant qu’il paralyse presque les deux hérissons, qui grelottent et se sentent défaillir. Encore dix minutes exposés à ce chaos frigorifique et les bêtes trépasseront. Leur vient alors une idée : se rapprocher. Coller leurs flancs et, côte à côte, se prémunir mutuellement contre le vent, contre le froid. Idée géniale autant que folle, puisque leur manteau piquant vient s’enfoncer par la même occasion dans leur chair. Ils s’éloignent donc, mais retombent sous les forces glaçantes du climat sibérien. Que faut-il : s’approcher trop, ou s’éloigner définitivement ? Existe-t-il un juste milieu ? Leur mort est-elle inéluctable ?

Ce conte est une “légende sibérienne, reprise par Schopenhauer“, nous apprend le philosophe Michel Onfray dans sa Théorie du corps amoureux (Grasset, 2000). En effet, Arthur Schopenhauer a repris cette histoire pour en faire un paradoxe philosophique dans son ouvrage Parerga et Paralipomena. Freud a fait connaître au grand public cette analogie sur l’intimité humaine dans un essai paru en 1921. La sagesse des Sibériens est alors utilisée sans leur en donner tribut, ce qui explique qu’aujourd’hui encore, beaucoup ignorent l’origine du “dilemme du hérisson”, souvent attribués au neurologue autrichien.

Au-delà du simple conte, donc, une parabole très intéressante sur les relations sociales. “Excessivement proche d’autrui, ou trop éloigné de lui, les risques négatifs paraissent semblables : un écœurement de déconvenue ou de solitude, une nausée de désappointement ou de réclusion, une lassitude, un désenchantement, un dégoût généralisé” analyse Michel Onfray. Il faut donc trouver le juste milieu entre la “présence abondante” et le “manque cruel“.