LE RETRO RUSSE. Le réalisateur soviétique Iouri Ozerov, rattaché au KGB, a servi à « coincer » Oleg Penkovsky, un espion qui collaborait avec les États-Unis.
« C’est un bon ami qui se tourne vers vous »
Tout commence à l’entrée du Bolchoï en 1960. Oleg Penkovsky, un espion du GRU soviétique farouchement opposé à Nikita Khrouchtchev, décide de faire basculer l’Histoire. En quelques lettres, il va ruiner la puissance russe et devenir le plus grand agent double de la Guerre Froide.
Il arrête un étudiant américain à la sortie du célèbre théâtre Bolchoï et lui transmet une lettre destinée à la CIA. « C’est un bon ami qui se tourne vers vous, un ami qui est déjà devenu un guerrier pour la vérité, pour les idéaux d’un vrai monde libre et pour la démocratie de l’humanité. Je vous demande en croire en la sincérité de mes pensées et de mon désir d’être à votre service. »
5000 pages sur le nucléaire soviétique
Oleg Penkovsky est surveillé de près mais n’est jamais démasqué pendant deux ans. Ce délai lui servira à révéler au MI6 et à la CIA des données hautement sensibles sur le nucléaire soviétique. Les Penkovsky Papers, 5000 pages au total, arrivent à cette conclusion : l’URSS ne fait absolument pas le poids face à la puissance nucléaire américaine. Une information cruciale en pleine crise des missiles de Cuba.
Cette action a, selon les historiens, permis d’éviter une vraie guerre nucléaire qui menaçait. Mais cet héroïsme va perdre Oleg Penkovsky, de plus en plus soupçonné par le KGB. Un officier va notamment contribuer à sa chute. Il s’appelle Iouri Ozerov et tout le monde le connaît en URSS. En effet, il a travaille pour les studios Mosfilm et réalise des documentaires sur la Seconde Guerre mondiale. Iouri Ozerov est parfaitement installé dans les hautes sphères du pouvoir.
Iouri Ozerov a lui-même fait placer les micros
Si le rôle du cinéaste russe au sein du KGB est mal documenté, son implication dans l’arrestation de Penkovsky est certifiée. En 1962, Iouri Ozerov visite lui-même la maison d’Oleg Penkovsky pour trouver les endroits idéaux pour placer des micros et des caméras. Une triste mise en scène qui sera sans doute la pire œuvre du réalisateur de « Libération ».
Dès que John Fitzgerald Kennedy affirme publiquement que les États-Unis savent où sont placées les têtes nucléaires russes à Cuba, le 22 octobre 1962, Oleg Penkovsky est arrêté chez lui. Le double agent du GRU est condamné à mort puis exécuté en mai 1963, à seulement 44 ans.