La peintre russe Zinaïda Serebriakova fut la première femme à être reconnue comme une artiste incontournable en Europe. Ses attaches avec la France étaient nombreuses. Voici quelques fragments de son œuvre
Née à Neskoutchnoïe près de Kharkov (actuelle Ukraine), Zinaïda Serebriakova portait à l’origine un patronyme français : Lanceray. Sa famille était en effet composée d’immigrés français implantés dans l’Empire russe depuis le XVIIIe siècle. Son oncle, par exemple, était le célèbre Alexandre Benois, peintre et décorateur ayant fondé le Mir Iskousstva. Cette famille très portée sur les arts lui inculqua une grande ouverture d’esprit.
Après ses études au lycée féminin, Zinaïda s’est établie à Paris en 1905, mariée à son cousin Boris Serebriakov. La révolution de 1917 l’a définitivement chassée de Russie. Elle était de toutes façons ruinée, et son mari fut emporté par le typhus en 1919. Elle décida de s’implanter définitivement en France en 1924.
C’est en France que cette artiste russe s’est véritablement épanouie, réalisant de sublimes portraits de son entourage, mais aussi des autoportraits. Son mécène, le baron belge Jean de Brouwer, l’invite à visiter plusieurs pays d’Afrique. Cela éveille son imagination et lui permet de belles créations. De retour en France, elle voyage en Bretagne où elle réalise le portrait de nombreuses femmes bigoudènes.
Zinaïda Serebriakova fut la première femme réellement considérée comme une peintre importante. L’Union soviétique, après la mort de Staline, lui dédia d’ailleurs une immense exposition. Etait-elle féministe ou engagée ? Loin de là, on ne peut pas la comparer, par exemple, avec une Natalia Gontcharova. Serebriakova a su s’imposer dans un milieu masculin grâce à sa patte particulière (et quelques appuis, comme tout artiste).
Ses visages sont expressifs et portent une lumière particulière. Ils nous parlent, nous sourient, questionnent notre intériorité. Pas étonnant que les Anglais, les Belges ou encore les Français lui aient consacré des expositions rétrospectives. Jusque-là, les peintres femmes ne pouvaient espérer que « faire partie » d’une exposition, sans jamais prétendre avoir la vedette.
C’est donc l’histoire du mérite qui finit par payer. Après des années en exil, loin de ses quatre enfants et de ses parents, Zinaïda Serebriakova a fini par les retrouver, avant de s’éteindre, à 82 ans, en 1967. A cette époque, les peintres chamboulent l’art, à l’instar des cubistes russes ou latins. Mais elle est toujours restée fidèle à ses inspirations figuratives.
Insouciance, dolce vita, rythme léger de la vie… Dans ses portraits, toutes les émotions négatives disparaissent en font place à l’âme. Cet art particulier est l’émanation même du brassage des arts qui entouraient la peintre : danse, musique, théâtre, littérature, sculpture…